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Fig. 59 – Théodore Rousseau, Une clairière en forêt de Fontainebleau (Carrefour de la Reine blanche), vers 1860-1862. Huile
                        sur toile, 82,6 x 145,4 cm. Norfolk, Virginia, Chrysler Museum of Art, don Walter P. Chrysler, Jr., inv. 71.2054               69



                        jusqu’àlafindesavie» .Onnecherchepasd’autresexplicationsàce  éléments qui l’enveloppent : les arbres, les forêts, les clairières, les
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                        silence.Signalonsànouveauaulecteurqu’ilfautattendre1879pour  espacesadoucisparlavégétationetlestapisdeverdure.Finalement
                        voir deux de ses œuvres entrer au musée du Louvre. Cela contredit  tout ce qui est rendu directement visible et saisissable. Contraire-
                        quelque peu ce qu’écrit Pierre Miquel : « Sensier a tout dit sur G.  ment à Michel, chez Rousseau, c’est l’arbre qui domine. Il le repré-
                        Michel et rien ne semble, biographiquement, pouvoir être ajouté  sente la plupart du temps en toute majesté, pointant sa cime droite
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                        d’essentiel » . Une magistrale erreur de jugement quand on pense  vers le ciel comme pour tutoyer ou taquiner le Créateur. Le chêne,
                        qu’en définitive Sensier ne révèle rien de ce qui paraît aujourd’hui  roidela«jungle»bellifontainerègneenmaîtreets’imposedansson
                        essentiel et que personne n’était mieux placé que lui pour le faire !  ensemble mais aussi dans ses détails et sa particularité. Contraire-
                                                                                     ment à Diaz, l’arbre y est solitaire. Dans la clairière de ce dernier,
                        L’heure est maintenant venue aux comparaisons, similitudes et  seul compte l’ensemble et non l’unique. Or, c’est l’unique qui in-
                        différences. S’ils se rejoignent, Michel et Rousseau n’en divergent  téresse Rousseau. C’est sa conception panthéiste de l’Homme
                        pas moins. Michel arpente Montmartre en tous sens, Rousseau s’y  confronté à la Nature, face à la Création. L’homme : une virgule
                        « égare » une fois pour peindre sa Vue de la plaine de Montmartre.  humaine ! C’est ce que souligne en substance Barbey d’Aurevilly
                        Effet d’orage, entrée au Louvre en 1879 (fig. 57). A notre connais-  dans ses Sensations sur l’art en 1886.
                        sance, c’est l’un de ses rares tableaux sur ce thème. Entre Michel
                        et Rousseau, on discerne ici le même agencement : la colline de  JamaisMichelnereprésenteainsil’Homme,minuscule,àpeinedis-
                        Montmartre et ses moulins qui animent le centre du tableau, vision  cernable sous un arbre. Chez lui, l’homme est au travail et conduit
                        de près pour Michel, perspective lointaine chez Rousseau. De ce  une lourde charrette tirée par de puissants chevaux. De L’Avenue
                        fait, Michel donne à sespeintures un caractère, pournepas direune  d’Hobbema, des maisons de Cabassud à Ville-d’Avray de Camille
                        verve, absent chez Rousseau.                                 Corot (1796-1875) – pour ne citer qu’eux – Michel et Rousseau
                                                                                     tirent une inspiration commune . Chez Michel, une route, parfois
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                        Si Rousseau peint la nature, ce n’en est pas la minéralité mais les  animée de personnages, s’échappe du premier plan pour conduire








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