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Edgar Degas
1834-1917

Le premier catalogue raisonné numérique

par Michel Schulman, expert

Edgar Degas en Normandie. Le peintre du cheval et des courses

Entre les danseuses et les baigneuses, le thème du cheval prend chez Degas toute sa place, dans ses peintures, ses pastels, ses dessins mais aussi dans ses sculptures...

Couverture du livre de Mariel Oberthür

Entre les danseuses et les baigneuses, le thème du cheval prend cavalièrement sa place dans l'oeuvre d'Edgar Degas. Si ses peintures du cheval triomphent dans les plus grandes collections publiques et privées, ses nombreux dessins et pastels - souvent préparatoires - apportent un éclairage complémentaire à sa vision - et sa passion - pour cet ami de l'Homme dont il fit la rencontre - la découverte intime ? - chez les Valpinçon au début des années 1860.

Mariel Oberthür consacre ici à ce sujet un ouvrage qui, par la pertinence de ses propos et des rapprochements qu'elle fait, prouve sa connaissance approfondie du cheval et, plus généralement, du monde équestre.

Degas fit la rencontre du cheval lors de son premier séjour chez ses amis Valpinçon en 1861. Il ne pouvait pas mieux tomber car leur résidence du Ménil-Hubert languissait au milieu des vertes collines de l'Orne, le pays du cheval et du Haras du Pin, créé par Louis XIV, et qui devait devenir un centre équestre de renommée internationale. Degas fait de multiples dessins, remplit près d'une trentaine de carnets qui lui serviront ensuite à exécuter ses peintures dans son atelier parisien.

Des peintures, il en fera de remarquables, jamais - à notre sens - de sublimes à l'image de ses pastels. Souvent, elles représentent le cheval au repos, dans l'attente du départ de la course ou à l'exercice à la recherche du calme avant le galop. Plusieurs oeuvres de musées les mettent en cette situation dont Le défilé (Fig. 123, p. 137 ) et Le faux départ (Fig. 94, p. 107).  Quant à La sortie du pesage (Fig. 113, p. 127), un homme regarde attentivement défiler des chevaux montés par des jockeys calmes et attentifs sauf celui qui retient son cheval à gauche du tableau. Le Champs de course (Fig. 112, p. 125) est lui aussi un tableau significatif en ce qu'il restitue non seulement une compétition mais encore une atmosphère avec, au loin, un village perché sur une colline, au milieu une scène équestre et, en premier plan, une voiture où siègent d'élégantes personnes,  un tableau au cadrage original et ambitieux qui lui donne tout son intérêt.

Parfois, le tableau comme Avant la course de la National Gallery de Washington (Fig. 111, p. 123) ajoute à l 'événement sportif une note sociale comme on peut le constater par la présence des cheminées fumantes qui témoignent de l'activité industrielle alors en plein essor. Chez Degas, les chevaux sont rarement au galop comme c'est le cas chez certains peintres anglais et américains de la même époque - ou presque - tels que Stubbs et Herring. Leur rapprochement - et leur distinction -  auront été clairement soulignés à l'exposition Country Life à Paris en 2018 où les chevaux de Degas apparaissent à l'arrêt.

C'est sans doute dans ses pastels et ses dessins que le talent de Degas exprime le mieux le mouvement et la motricité du cheval. On retiendra ainsi Le Jockey . Cheval au trot du Philadelphia Art Museum (Fig. 14, p. 67), Les Quatre Jockeys de la Yale University Art Gallery (Fig. 141, p. 159), et Le jockey au casque bleu vu de dos du Richmond Virginia Museum of Fine Arts (Fig. 59, p. 74), certes un tableau qui ressemble plus à un pastel qu'à une huile.

Mais c'est dans la sculpture que Degas passe maître du mouvement du cheval. Il y exprime pleinement sa maîtrise des formes. A travers ses sculptures, Degas façonne le cheval, respecte et restitue sa stature et sa dynamique. On pourrait être en droit de poser la question : la sculpture avait-elle chez Degas vocation à remplacer ses peintures et ses pastels ? Inquiet de sa cécité débutante, Degas aurait, alors, pu légitimement s'adonner à la sculpture avec ses  formes et ses volumes plus faciles à dompter. Il n'en est rien puisque Degas commence à sculpter dès 1880, réalisant sa Petite danseuse de Quatorze Ans en 1881.

Un tel ouvrage est à marquer d'une pierre blanche. Mariel Oberthür a pris soin d'ajouter à sa description du cheval  une approche parfois historique  et sociale  du monde du cheval à cette époque. On retiendra par exemple la visite du Haras du Pin par Napoléon III en 1863. Ce livre a été écrit. Il manquait, le monde de la danse accaparant à lui seul tous les regards intéressés par Degas. On s'en délectera au galop.  

Mariel Oberthür, Edgar Degas en Normandie. Le peintre du cheval et des courses, éditions Gourcuff Gradenigo, Paris, 2019

Contact : mariel.oberthur@gmail.com

Publication : 25-02-2020